Oui, c'est ça, un cirque. Avec tous les numéros possibles et imaginables au moyen de bouquins, BD, films et disques. Un machin modeste pour attendre la catastrophe imminente (l'"impending doom" en question). Quelle catastrophe me direz-vous ? Bof, 'préfère pas savoir...
Un film finlandais de science-fiction avec des Nazis, de l'humour idiot et visiblement de sacrés gros moyens, ça vous tente ? En ce qui me concerne, oui !
Le trailer officiel :
Et les trois teasers en une seule vidéo :
Bref, un bon gros défouloir en perspective le 4 avril prochain, sachant que la B.O. a été confiée aux bons soins des Slovènes de Laibach ! Pour plus d'infos, un petit tour sur le site officiel du film.
A quand les Illuminati et les pyramides d'Egypte ? Ah ben c'est déjà fait, un nanar qui répondait au nom de Cinquième élément.
Fort du succès du Kickstart achevé en novembre dernier pour le financement de son adaptation graphique de The Dream-Quest of Unknown Kadath, Jason Thompson a annoncé via sa structure que l'album était prêt à être envoyé aux souscripteurs. Vous pouvez vous aussi profiter d'une part de rêve en commandant ce qui s'annonce comme une véritable merveille directement sur le site de Mockman.
En outre, un poster de la carte du parcours de Randolph Carter dans le Dreamland est également disponible, et ma seule réaction à sa vue a été quelque chose du genre "gfxzzzzt !". Jugez plutôt (cliquez dessus, hein ?) :
C'est par cette fameuse expression que l'équipe du magazine le plus fou aimait à se présenter. Et c'est avec bonheur que l'on peu dès aujourd'hui se procurer une anthologie des meilleures histoires parues dans ces imitations de Mad dénommées Panic (édité par E.C. en complément de Mad), Flip, Whack, Crazy Wild ou encore Get Lost pour n'en citer que quelques-unes. Et qui d'autre que le plus grand éditeur de BD au monde (oui j'assume), Fantagraphics, pouvait offrir une édition à la mesure de cette folie ?
192 pages de pur bonheur parodique dont certaines par des artistes Mad (Jack Davis, Will Elder), et même Jack Kirby ! Une belle manière d'accueillir le printemps.
Dire de Gary Gianni (né en 1954) qu'il
est un maître de l'illustration revient à rendre ridicule le plus
absolu des pléonasmes. Illustrateur pour le Chicago Tribune et la
télé à ses débuts , ça n'est qu'en 1990 qu'il se fait
véritablement connaître en tant que tel en illustrant Jules Verne
(20.000 Leagues Under the Sea) ou des classiques de l'écrivain
Américain O. Henry. Puis c'est au tour de la bande dessinée avec
Indiana Jones ou The Shadow avant qu'il ne propose sa propre création
avec les Monstermen, tout d'abord présentée en "back-up" des
histoires de Hellboy puis éditée en un unique one-shot en 1998.
La consécration pour l'illustrateur
va se profiler via un contrat avec la firme Anglaise Wandering Star
pour laquelle il va produire une série saisissante de peintures et
de dessins pour accompagner les œuvres de Robert E. Howard (Conan,
Solomon Kane). Enfin l'ultime reconnaissance, Gary Gianni prend les
rênes en 2004 d'un des plus grands "strip" de l'histoire de la bande
dessinée mondiale (avec Mark Schultz au scénario), le prestigieux
Prince Valiant, devenant ainsi le troisième (!) dessinateur de la bande
depuis 1937 après le grand Hal Foster (son créateur) et son élève
John Cullen Murphy.
Héritier des illustrateurs Américains
de la fin XIXème / début XXème siècle, Gary Gianni s'inscrit
définitivement dans la lignée des Franklin Booth, Joseph Clement Coll ou Gustave Doré : sa maîtrise des contrastes et des
lignes d'encres subtiles révèlent un art dynamique et hypnotique du
"storytelling". Invoquant l'esprit des grands écrivains de la
littérature fantastique et d'horreur et usant à l'occasion des
codes des magazines "pulp", Gianni parvient avec ses Monstermen à
remodeler sa source d'inspiration en une création extrêmement
personnelle, empreinte d'humour et d'une galerie monstrueuse à toute
épreuve. Menées par le réalisateur millionnaire Lawrence St.
George et son acolyte Benedict, membre du groupe occulte Corpus
Monstrum* (dont l'équipe n'est pas sans rappeler celle d'un certain
Doc Savage), les aventures des Monstermen sont autant d'énigmes pour
les lecteurs que pour leurs protagonistes.
Le recueil Gary Gianni's Monstermen and Other Scary Stories, tout récemment édité par Dark Horse fait
honneur à la série : l'intégralité des aventures publiées sous une présentation cartonnée, papier mat du
plus bel effet et qualité d'impression optimale pour un artiste qui
le mérite très largement. Ajoutez à cela des bonus savoureux,
quatre nouvelles de grands noms tels que William Hope Hodgson, Robert
E. Howard, Clark Ashton Smith et Perceval Landon, toutes magnifiquement illustrées
par Gianni. En somme une présentation ultra soignée pour un contenu
qui synthétise les plus jouissif des ingrédients, par un très très grand artiste.
*Et dont le visage masqué par un
heaume de fer nous fait nous demander si le Mr. Choc de Tif et Tondu
n'est pas, aussi surprenant que cela puisse sembler, passé par là !
Lorsqu'il s'agit de célébrer leurs grands maîtres du pinceau et de la plume, les Américains font rarement les choses à moitié. La maison d'éditions IDW, cinquième plus gros éditeur de comic books aux États-Unis est connu en premier lieu pour publier des séries de qualité plutôt médiocres (pour rester poli) issues des licences télé et ciné (Star Trek, Buffy, Transformers etc.), de manière analogue à ce que pouvait proposer Dark Horse à leurs débuts. Mais IDW c'est aussi le havre de la majorité des œuvres de Ashley Wood ou de Ben Templesmith, auteurs qui méritent une attention plus marquée au regard de la personnalité évidente de leurs travaux respectifs. Enfin, la maison d'édition se veut également l'abri de collections aux qualités éditoriales et artistiques croissantes, telles que la série d'ouvrages dirigés par Craig Yoe sur l'âge d'or de la bande dessinée américaine ou la série des "Artist's Edition". Cette dernière se voit aujourd'hui augmentée d'un nouveau titre à la beauté renversante.
Wallace "Wally" Wood (1927-1981) est souvent considéré comme le plus grand dessinateur Américain avec Jack Kirby. D'une productivité phénoménale dans le domaine de la BD ou de l'illustration, passant du dessin réaliste en totale corrélation avec le sujet (science-fiction, policier ou horreur) à la caricature la plus délirante (sa participation à Mad Magazine demeure l'un de ses plus grands "hauts faits"), Wood fit les beaux jours de la série des géniaux E.C. Comics dans les années 50 et 60 et contribua grandement aux succès des divers projets auxquels il fut associé, de concert avec Harvey Kurtzman, Jack Davis ou Bill Elder, autres grands noms qui changèrent profondément la vision de la bande dessinée mondiale et dont l’œuvre demeure de nos jours incroyablement moderne et vivante.
Cette anthologie reprend une sélection tous genres (bien qu'en grande partie tournée vers la S.F.) d'histoires publiées dans les diverses séries E.C., présentant des "scans" incroyables de planches originales en taille réelle, ce qui explique les proportions inhabituelles pour un ouvrage de ce type (38 x 55 en gros !). Le trait expressif et dynamique, la luxuriance des décors et la richesse des scénarios en sont ainsi magnifiés comme jamais ! En bonus, une histoire complète jamais publiée ("Spawn of Venus"), scannée directement des archives de l'artiste (on peut même voir les cases délimitées au "tipex" et les fardes sur lesquelles les planches se trouvaient) pour un résultat tout aussi dément. Certes, un ouvrage pour collectionneurs avant tout, dont la maniabilité est sujette à caution dès lors qu'il s'agit de lire à proprement parler, mais quel régal permanent pour les yeux !
Côté "douloureuse", la première édition est d'ores et déjà épuisée, mais IDW prévoit un second tirage pour mai ou juin de cette année. Il va vous falloir économiser (150 dollars en gros), mais le résultat étant au-delà de toute polémique, se nourrir de féculents pendant six mois vous paraîtra comme le paradis sur terre.
La prochaine édition de la collection verra l'intégralité de la saga "Born Again" de la série Daredevil par Frank Miller et David Mazzuchelli, scannée entièrement par ce dernier ! Amen.
Le groupe Marseillais Kill The Thrill, discret mais toujours efficace, a joué mercredi dernier avec Dirge et Cage Apotheek au Petit Bain à Paris. Une performance superbe qui témoignait d'un plaisir évident à jouer devant un public entièrement réceptif et communicatif, ce qui ne surprendra personne tant leur parcours et leur présence scénique inspirent toujours autant de respect et de soutien. Une occasion de revenir sur leur discographie frugale mais mémorable.
DIG (1993)
1993 : la vague metal indus i tutti quanti déferle sur la France sans crier gare. Les machines prennent leur place sur la scène musicale notamment grâce à Ministry qui aura démontré leur utilité et leur efficacité. Le succès des français de Treponem Pal et de leur excellent Excess & overdrive a de plus fortement contribué à éveiller l'intérêt pour des musiques hybrides mêlant sons organiques et synthétiques, rythmes mécaniques et ambiances froides. Avec Dig, les marseillais de Kill The Thrill affirment immédiatement leur particularité en jouant de l'émotion et de la pulsion comme un catalyseur de leur musique. Revendiquant des influences aussi diverses que variées (Swans, Killing Joke, Godflesh), KTT propose avec cet album' une version plus humaine du rock industriel, exécutée dans une urgence primaire mais néanmoins compensée par des arrangements mélodiques travaillés, constante de chaque album depuis. La boîte à rythmes froide et mécanique martèle jusqu'à la lobotomie ("Sixth column", "I will die", "My history"), ou appuie un mouvement martial et épique sur l'excellent et spasmodique "Blood money" ou le superbe et très mélodique "Out loud". Les guitares oscillent entre metal à la Godflesh ou plus noise façon Sonic Youth ou Swans. Le seul regret concernant KTT est peut-être le chant pas toujours très distinct dans ce chaos sonore très efficace, bien qu'il participe lui aussi à magnifier cette émotion propre au groupe. Rare survivant de cette époque et surtout peu prolifique (serait-ce la clé de la longévité ?), KTT n'aura en tout et pour tout pondu que trois albums et un mini en 10 ans de carrière. La qualité ne les ayant jamais quittés depuis ce premier effort, on aurait tort de s'inquiéter de leur avenir artistique.
"Sixth Column"
LOW (1997)
Comment peut-on arriver à un tel degré de beauté, de souffrance et d'émotion à fleur de peau alors que l'on n'a qu'un seul album à son actif ? Bien évidemment il n'y a pas de recette toute faite, et les Marseillais auraient très bien pu parvenir à ce résultat dès le premier album. Mais Low n'est plus un album : l'expérience va au-delà. Fournaise de pleurs et de déchirements cathartiques, Low est une réussite totale. Outre qu'il confirme le talent de ses auteurs, il inscrit ici son nom au tableau béni des chefs-d’œuvre du rock au sens large. La boîte à rythmes exulte de martèlements lourds et martiaux et paradoxalement "entraînants", en totale harmonie avec les murs de guitares "noise" et mélodiques de toute beauté, la basse acérée et le chant d'écorché vif de Nicolas. Les fabuleux "Splintered" et "Empty" confinent au génie, tandis que les plus lourds "I believed in" et son thème obsédant ou "Missing time" se font plus intimistes. La participation du bidouilleur électronique eRikm à l'album permet la présence de pauses "ambient" entre chaque tempête. Si les influences de Killing Joke (émotion) ou celle de Godflesh (dynamique rythmique) sont toujours évoquées, elles sont ici complètement assimilées en une autre identité propre, celle d'un groupe qui sait faire rimer énergie, désespoir et beauté pure avec un brio évident. Magnifique à pleurer...
"Splintered"
203 BARRIERS (2000)
Une fois de plus force est de constater une évolution significative concernant le son et l'expression. 203 Barriers propose un son ample, une production léchée qui exacerbe les harmoniques et les mélodies. Le monolithisme des débuts fait ici place à une grande variété d'atmosphères et de rythmes, et l'ombre bienveillante de Michael Gira (des regrettés Swans) que les Marseillais ont réussi à débaucher n'y est certainement pas étrangère (bien que les KTT, déçus par le résultat, en aient remanié le mix final) L'agressivité est ici édulcorée au profit d'une mélancolie noire qui s'infiltre dès les premières secondes du morceau-titre. Le chant d'écorché vif de Nicolas Dick se fait par moment plus mélodieux que jamais, rapprochant KTT de l'esprit cold-wave. Même les morceaux les plus directs comme "Crime", "Western" ou "Stase" s'en trouvent marqués et gagnent en efficacité autant qu'en force émotionnelle. "Shudder to think" et "Breath" vont chercher du côté introspectif cher à KTT sur des tempi très aériens, et le superbe "Antique tools" combine toutes les composantes du groupe en alliant énergie et mélodie dans une osmose parfaite. Cold wave industrielle, rock mélodique entre Killing Joke et les Swans, KTT est tout cela à la fois et rien d'autre que lui-même. Sincérité et énergie pour exutoire réfléchi : si avec ça il y en a encore pour penser que le rock est mort...
"Crime"
TELLURIQUE (2005)
Chaque sortie des marseillais est une pierre de plus à un édifice monolithique qui pourtant ne semble jamais figé, et Tellurique pourrait bien en être la clé de voûte. Comme s'ils avaient attendu toutes ces années, bâtissant un refuge initialement brut et modeste, pour célébrer l'érection en des cieux interminables d'un monument que personne ne pourrait ignorer. Ce quatrième album est un aboutissement énorme : Kill the Thrill étudie une version artistique de la tectonique des plaques, guettant la moindre secousse sismique et arrive avec Tellurique à se placer à l'épicentre de ce cataclysme sonore. Entendez par-là que les émotions que vous procureront cette merveille n'atteindront rien de moins que le maximum sur une imaginaire échelle de Richter du cœur et de l'âme. Si le style général n'a guère changé ("A little salt for a better feeling", qui ouvre la marque), l'approche quant à elle révèle un souci de mélodie par-dessus tout. La mélancolie et le désespoir se nichent toujours dans les murs de guitares "noise", les mélodies à la limite de la cold-wave (le magnifique "Like cement"), mais un souffle épique balaye l'intensité de ce désespoir en le transformant en un cri de révolte dont la sincérité exulte à chaque seconde ("Soave", morceau à l'esprit noise-punk, au texte en français chanté par une Marylin incroyablement vindicative). Tellurique c'est aussi des arrangements surprenants, entre ambient et samples néoclassiques ("Permanent imbalance","Non existence"), voire heavenly (Les choeurs de "An indefinite direction") et toujours ce sentiment de marcher sur le fil du rasoir. Les influences revendiquées de Godflesh (que KTT reprend avec "Us and them", déjà présent sur un "tribute" précédemment sorti, très réussie et personnelle) ou des Swans ("Body") sont assimilées et même sublimées dans ce flot incandescent de guitares aériennes et acérées, de voix baignées tour à tour dans la rage et l'éther, dans cette habileté à créer des climats tous plus distincts les uns des autres. Les marseillais savent faire respirer leur colère, la rendre plus crédible à l'aide de passages d'une beauté sans visage si ce n'est celui d'un être qui a su voir plus loin que l'horizon. A l'image des éoliennes qui ornent sa pochette, Tellurique souffle un vent au contact à la fois doux, subtil et rêche, tel un écrin dont l'intérieur recouvert de fourrure logerait des poèmes d'un autre monde. Le temps n'a plus de prise : Tellurique ou l'un des meilleurs albums de l'année et un chef-d’œuvre que vous aurez honte de rater. Chapeau bas...
"A little salt for a better feeling"
Ce texte est une refonte de chroniques publiées sur Guts of Darkness en 2004 et 2005.